La Méthode
Lee Strasberg s'inspira de l'enseignement de Stanislavski pour créer sa Méthode, une théorie sur le jeu dramatique qu'il transmettait à ses élèves à l'Actors Studio.
Marilyn, après son installation à New York en 1955, commença à travailler avec Strasberg et devint rapidement une grande adepte de la Méthode.
Selon Strasberg lui-même, la Méthode est « la mémoire de l'expérience de tous les grands acteurs à travers tous les pays et tous les temps. Le meilleur nous vient de Stanislavski, le reste vient de moi. Il n'y a pas de règles. La Méthode trace un chemin qui mène au contrôle de soi plutôt qu'à une inspiration spontanée. Elle suppose une fusion entre l'acteur et le personnage ».
L'enseignement de cette théorie encourageait les acteurs à aller au-delà d'une simple imitation de la réalité, à utiliser leur propre champ émotionnel afin de convoquer leur mémoire affective, phénomène qu'ils pouvaient utiliser dans leur jeu comme une « clé d'or ».
Pour les partisans de la Méthode, le jeu dramatique est un moyen de révéler la vérité de la personnalité des acteurs. Ceux-ci puisent en eux-mêmes le matériel de base, d'où l'insistance de Strasberg pour l'auto-apprentissage et l'introspection par l'intermédiaire de la psychanalyse freudienne. Strasberg accorda à Marilyn un enseignement privé, à condition qu'elle entreprenne une psychanalyse pour régler ses problèmes avec son passé et mettre au jour ses énergies enfouies.
Marilyn mit pour la première fois en application l'enseignement de Lee Strasberg dans « Bus Stop » (1954), qui lui valut ses premières vraies critiques en tant qu'actrice.
Mais son film suivant « The Prince and the Showgirl » fut réalisé par l'un des plus grands détracteurs de la Méthode : l’acteur britannique Laurence Olivier était persuadé que le métier d'acteur était fait de technique additionnée des détails apportés par le jeu. Il disait : « Ce qu'ils appellent la Méthode n'est pas très utile à l'acteur. Au lieu de répéter une scène, ce qui les perturbe, ils discutent et discutent et discutent. Je préfère répéter une scène huit fois plutôt que de perdre mon temps en bavardages abstraits. Le jeu d'un acteur repose sur son travail. Les discussions sur les motivations et ainsi de suite, c'est de la foutaise ».
Pour lui le jeu d'acteur reposait sur une préparation minutieuse et sur l'accumulation de détails extérieurs permettant de façonner un personnage. A ses yeux, l'introspection était une aberration dans la mesure où l'acteur était censé se laisser guider par les intentions de l'auteur et des siennes
Pour tourner « The Misfits » Marilyn suivit les consignes de la Méthode pratiquement mot à mot, modifiant les répliques et brodant, car elle pensait que seules les émotions étaient importantes, non les mots. Arthur Miller, qui critiquait sévèrement la soumission inconditionnelle de ses adeptes de la Méthode, écrivit :
« Avec les encouragements de ses professeurs, elle se perdait en improvisations qui sont du ressort du cours d'art dramatique, et non pas du réel travail d'acteur ».
L'acteur ne doit pas se contenter d'imiter la réalité émotionnelle, mais il doit la reproduire en ayant recours à la « mémoire émotionnelle » ou « mémoire affective ». Ainsi pour que le jeu de l'acteur soit psychologiquement cohérent, ce dernier doit se laisser guider par un seul élément, sa personnalité. Pour parvenir à un jeu spontané et vivant, l'acteur doit s'exercer à l'improvisation au cours des répétitions (et même dans certains cas, pendant le spectacle). Tous ces principes sont régis par une foi quasi mystique en l'art du théâtre et en la vérité que celui-ci porte en lui.
C'est précisément parce que Strasberg était convaincu que l'émotion vraie trouvait sa source dans l'histoire personnelle de l'acteur, qu'il encourageait ce dernier à se débarrasser de tout ce qui aurait pu entraver l'accès à cette vie intérieure - de la même façon il encourageait la psychothérapie et était lui-même devenu une sorte d'analyse pour ses disciples.
A l'époque où Elia Kazan était professeur à l'Actors Studio, la Méthode privilégiait l'action et l'émotion, la fidélité absolue au texte et la cohérence des personnages.
Sous l'influence de Strasberg, la mémoire sensorielle et l'histoire personnelle de l'acteur étaient mises en exergue, avec pour résultat une hyperémotivité.